Ancien officier de police, Olivier Marchal a troqué les planques contre les plateaux, sans jamais perdre de vue la rue. Réalisateur de 36 Quai des Orfèvres, créateur de Braquo, visage incontournable du polar français, il construit depuis vingt ans une œuvre rugueuse et sincère, marquée par la violence du réel et une fidélité à ses valeurs. C’est avec grand plaisir que les lecteurs de LiFE Magazine le retrouvent à l’occasion d’un échange exclusif autour de Pax Massilia, son dernier tournage marseillais. Il s’y livre avec la même intensité que ses personnages : sans filtre, entre ombre et lumière.
Vous êtes passé de la police au cinéma : qu’est-ce qui vous a poussé à raconter la violence et la réalité des rues à l’écran ?
Entré en brigade criminelle à 21 ans, j’ai été confronté très vite à des affaires de meurtres, d’enlèvements, de violences sur des enfants… Je me suis rendu compte que « les monstres » existaient vraiment, loin des clichés cinématographiques. Marqué par le suicide de deux de mes coéquipiers et par la mort en service de mon formateur lors de mon stage d’intégration au RAID, j’ai commencé à noircir des cahiers pour exorciser ces horreurs. Quitter la police et basculer vers le cinéma m’est alors apparu comme un prolongement naturel : continuer à coucher ces réalités sur le papier, puis à l’écran, pour en garder trace et sensibiliser sans jamais édulcorer la vérité.
Votre style est sombre, réaliste, humain : qu’est-ce qui nourrit encore aujourd’hui votre inspiration ?
Mon inspiration naît d’abord de l’écriture et de mes lectures d’enfance ; Chandler, Thompson, Frédéric Dard, ces univers de losers mélancoliques et d’enquêtes sans concession. Aujourd’hui, ce sont aussi mes projets futurs qui m’animent : une adaptation d’une pièce américaine pour Jeff Bridges, un roman noir en gestation, ou encore une fresque tirée d’une bande dessinée sur la Première Guerre mondiale en hommage à mes grands-pères. Chaque nouveau scénario, chaque ligne posée est un moyen de prolonger ce travail de mémoire et de transcender la réalité par la fiction..
Dans Pax Massilia, vous revenez à Marseille, ville de polar par excellence. Qu’est-ce qui vous a séduit dans ce projet ?
Marseille m’a frappé dès ma première enquête dans les années 80 : la lumière du port, l’énergie brute des quartiers, la chaleur humaine. Contrairement à Paris, où règnent aujourd’hui l’indifférence et le chaos, Marseille reste une ville ouverte : un simple café en terrasse suffit à nouer des amitiés en quelques minutes. Ce terrain sensible, à la fois dur et chaleureux, offre le décor idéal pour un polar authentique, ancré dans la vie réelle et la complicité des habitants.
Comment s’est déroulé le tournage de Pax Massilia ? Des anecdotes marquantes à partager?
Le tournage a été rythmé par la complicité et la spontanéité marseillaise.Marseille en est le personnage principal ! J’adore cette ville où, un matin, on installe nos caméras sur une terrasse de café et, en moins de cinq minutes, des habitués attablés deviennent figurants. Chaque jour apporte son lot d’imprévus : un passant recruté sur le vif, un commerçant qui prête gracieusement son hall… Cette chaleur humaine et ce sens de la fête typiquement du Sud ont transformé le plateau en un véritable carnaval filmé.
Entre réalisateur, acteur et ancien flic, lequel prend le dessus aujourd’hui ?
C’est clairement le réalisateur-scénariste. Si j’ai démarré comme comédien et gagné en popularité grâce à la télévision, c’est le film 36 Quai des Orfèvres qui a véritablement façonné ma carrière. Passer derrière la caméra m’a permis de maîtriser l’écriture et la mise en scène, de donner corps à ma vision, et de gagner la confiance des producteurs et du public. Aujourd’hui, c’est ce rôle de créateur global qui prévaut. Avec le succès des séries policières en streaming,
Comment voyez-vous l’évolution du genre et votre place dedans ?
Le polar se doit d’allier authenticité et mise en scène soignée. Le public attend autant la vérité brute que le « rêve » cinématographique : la beauté des images, le rythme, la tension. Ma place, c’est de continuer à exploiter mon vécu de flic pour nourrir la narration, tout en offrant une dimension visuelle ambitieuse : dénoncer la violence et, au même temps, transcender la réalité pour captiver et émouvoir.
Vous êtes un homme plutôt de raison ou de passion ?
Je suis un passionné fougueux. Mon éducation judéo-chrétienne et le sens du devoir hérité de mon père m’ont appris la rigueur et le travail acharné, j’ai commencé à 13 ans à gagner ma vie à ses côtés. Mais c’est la passion qui guide mes choix, mes collaborations et mes nuits d’écriture. Sans cette flamme, je ne pourrais ni créer ni avancer..
Que pouvez-vous souhaiter à nos lecteurs du LiFE Magazine ?
Je leur souhaite avant tout bonheur et optimisme, un été riche en découvertes et en émotions. Et surtout, qu’ils ne s’ennuient pas en parcourant ces mots car je parle toujours avec le cœur !