Anne-Sophie Pic, née le 12 juillet 1969 à Valence, est une cheffe étoilée française dont l’impact sur la gastronomie contemporaine est indéniable. Issue d’une lignée de restaurateurs, elle grandit dans le milieu de la cuisine, au sein du restaurant familial, La Maison Pic, fondé par son arrière-grand-père en 1889. Bien que son père, Jacques Pic, ait été une figure emblématique de la cuisine française, Anne-Sophie ne se lance dans la gastronomie qu’après avoir étudié à l’École hôtelière de Valence et fait ses premières armes dans des établissements prestigieux, tels que le restaurant de l’Hôtel de Crillon à Paris. En 1992, suite au décès de son père, elle reprend la direction de La Maison Pic, où elle commence à réinventer la carte en y insufflant sa créativité et sa vision personnelle. Sa cuisine est caractérisée par une recherche constante d’équilibre entre les saveurs et les textures, ainsi qu’une attention particulière portée aux ingrédients de saison. En 2007, elle est honorée de sa première étoile au guide Michelin, suivie de deux autres en 2011, ce qui fait d’elle la seule femme en France à détenir trois étoiles. Anne-Sophie Pic ne se limite pas à son restaurant phare, elle a su élargir son empreinte en ouvrant plusieurs établissements en national et à l’international, notamment à Lausanne, Londres ,Tokyo,
Hong-Kong et Paris, chacun reflétant son style unique. Sa passion pour la transmission du savoir l’a également conduite à publier plusieurs ouvrages de cuisine, où elle partage ses recettes et sa philosophie culinaire, mêlant techniques classiques et inspirations modernes.
Reconnaissant l’importance de la place des femmes dans la gastronomie, elle s’engage activement pour promouvoir l’égalité des sexes dans ce domaine. Son parcours exemplaire lui a valu de nombreuses distinctions, tant au niveau national qu’international, et elle est souvent sollicitée en tant que conférencière pour partager son expérience.
En 2018, Anne-Sophie Pic est élue « Meilleure Femme Chef du Monde » par le World’s 50 Best Restaurants, consolidant ainsi sa position comme une icône de la haute cuisine. Sa quête incessante d’innovation et son dévouement à l’art culinaire continuent d’inspirer et de motiver de nouvelles générations de chefs à travers le monde, faisant d’elle une figure emblématique de la gastronomie française.
Anne-Sophie Pic, cheffe étoilée de renommée internationale, est reconnue pour son talent et sa créativité. Elle est la cheffe la plus étoilée au monde avec 8 étoiles. Sa cuisine allie tradition et modernité tout en valorisant les produits de saison. Pionnière de la cuisine végétale, elle répond aux attentes contemporaines et inspire de nombreux chefs. C’est avec grand plaisir qu’elle se confie aux lecteurs du LiFE Magazine.
Comment pourriez-vous définir votre univers gastronomique ?
Ma cuisine est profondément ancrée dans le savoir-faire de la cuisine française tout en étant ouverte sur le monde. Elle se caractérise par une approche très végétale, riche en arômes complexes. J’aime travailler des associations de saveurs inédites et rechercher l’équilibre parfait entre puissance aromatique et finesse. Au cœur de ma démarche se trouve la philosophie de l’Imprégnation, qui me permet d’explorer le potentiel de chaque ingrédient à travers des techniques comme les infusions, les extractions ou la fermentation. Cela crée un séquençage de saveurs qui marque la mémoire gustative avec sensibilité.
Quels ont été les moments clés de votre carrière ?
Reprendre le restaurant familial en 1997 a marqué un tournant dans ma carrière. En tant qu’autodidacte, j’ai appris sur le terrain, ce qui m’a permis de trouver ma propre voix en cuisine. Quelques années plus tard, en 2007, l’obtention de la troisième étoile Michelin pour notre restaurant Pic*** à Valence a été un moment de fierté et de bonheur, mais aussi un début qui m’a offert un sentiment de liberté. Aujourd’hui, l’ouverture de mes restaurants à Paris, Hong Kong, Lausanne et Dubaï me permet d’explorer de nouveaux horizons tout en restant fidèle à l’essence de ma cuisine.
Quelles sont vos inspirations culinaires ?
Je puise mon inspiration dans la nature qui m’entoure, ainsi que de mes rencontres et voyages. Chaque terroir et produit que je découvre enrichit ma créativité. Les échanges constants avec mes équipes, chefs et producteurs du monde entier me permettent d’explorer de nouvelles idées. Au-delà de la gastronomie, je trouve également une grande source d’inspiration dans d’autres formes d’art, comme la parfumerie et la musique. Récemment, j’ai eu la chance de collaborer avec la violoncelliste Astrig Siranossian pour un dîner unique, « Sublimes Accords », qui se déroulera le 10 juillet dans mon restaurant Pic*** à Valence.
Êtes-vous une femme de passion ou de raison ?
Je me considère avant tout comme passionnée, particulièrement par la création. La cuisine est un espace où l’émotion prend vie à travers les saveurs, les textures et les rencontres. Créer un plat, que ce soit en un mois ou en un an, est une aventure qui m’anime profondément. C’est cette énergie passionnée qui me guide dans tout ce que je fais.
Quelle est votre méthodologie en cuisine ?
Lorsque j’imagine un plat, je commence par définir une trame aromatique qui me permet de créer une harmonie de saveurs équilibrées. Une fois cette base établie, je travaille sur les textures et l’esthétique du plat pour offrir une expérience sensorielle globale. Le séquençage des saveurs est essentiel dans mes créations, et j’apprécie de jouer avec les opposés : l’amertume et la douceur, l’acide et l’umami, pour bâtir des compositions équilibrées et surprenantes. Par exemple, mon plat « Sur le fil » rend hommage aux premières asperges blanches, où l’amertume florale se marie à la douceur de l’orge et du miel, avec des saveurs iodées du caviar ajoutant une touche umami.
Comment intégrez-vous le véganisme dans vos plats ?
Étant originaire de la Drôme, une région où la nature et le végétal occupent une place privilégiée, le végétal est naturellement intégré dans ma cuisine. La Drôme est l’une des premières régions bio en France, renforçant ma connexion avec les produits de la terre. Aujourd’hui, le végétal joue un rôle de plus en plus important dans ma cuisine. Bien que je ne cherche pas à devenir 100 % végan, je réfléchis constamment à des alternatives végétales dans mes restaurants.
Y a-t-il un projet culinaire dont vous rêvez ?
Quand j’étais enfant, je rêvais de devenir styliste. Aujourd’hui, je suis ravie de revisiter l’univers de la haute couture grâce à ma collaboration avec la Maison Dior, qui dure depuis un an. Ce projet me permet d’interpréter les codes de Dior à ma manière. Il y a toujours des projets qui m’inspirent, et celui avec Dior est déjà un rêve qui se réalise. Je suis impatiente de partager d’autres projets à venir.
Comment gardez-vous un œil sur vos établissements ?
Je visite tous mes restaurants au moins deux fois par an, mais il est essentiel que tous les chefs viennent régulièrement à Valence, au Pic Lab, ma cuisine d’essai. Cet espace de création me permet d’explorer de nouvelles recettes. L’échange, le partage et la transmission sont au cœur de notre démarche, garantissant l’authenticité et la cohérence de chacun de mes établissements. La complémentarité avec mon mari, David Sinapian, est également indispensable pour la gestion quotidienne.
Quelle est votre « madeleine de Proust » ?
Ma madeleine de Proust est l’île flottante. J’ai toujours été fascinée par la légèreté du blanc d’œuf et la douceur de la crème anglaise. Mon arrière-grand-mère, Sophie, a transmis la passion de la cuisine dans notre famille en préparant une île flottante aux pralines roses, absolument divine. Ce dessert est devenu un symbole pour nous et a toujours une place spéciale sur notre carte. Nous avons récemment choisi de le revisiter avec des touches aromatiques originales tout en préservant son esprit.
Que souhaiteriez-vous aux lecteurs du LiFE Magazine ?
Je leur souhaite de ne jamais cesser de rêver et de laisser libre cours à leur créativité. Pour moi, la cuisine est une rêverie.