Isabelle Adjani, actrice emblématique et lauréate de cinq César, qui a partagé l’écran avec de nombreuses personnalités, dont Nicole Kidman, dans « Un Couple parfait » sortie sur Netflix. Dans son premier livre intitulé « Du côté de chez Marilyn » coécrit avec Olivier Steiner et publié aux Éditions de l’Observatoire, elle explore les thèmes de la célébrité et de l’identité. À l’aube de nouveaux projets, elle continue de captiver par son talent et sa passion pour l’art et se confie aux lecteurs du LiFE pour notre plus grand plaisir.
Qu’est-ce qui vous a motivée à coécrire « Du côté de chez Marilyn » avec Olivier Steiner, et quel message souhaitez-vous transmettre aux lecteurs ?
Ce projet est né d’une fascination d’Olivier Steiner pour Marilyn, celle qui fut à la fois icône et énigme. Il a voulu créer un dialogue imaginaire entre elle et moi, une sorte de miroir intime où nos voix se confondent. Ce n’est pas une biographie ni un hommage figé, mais une exploration sensible et poétique de ce que Marilyn a pu dire en croisant mes propres interviews, au cours des années. Le message est clair : derrière l’image, il y a une femme. Elle, femme blessée, lucide, magnifique dans sa fragilité, quant à moi, actrice en interrogation depuis l’adolescence.
Comment Marilyn Monroe a-t-elle marqué votre parcours artistique, et que voulez-vous transmettre sur elle ?
Marilyn incarne cette tension entre vulnérabilité et puissance, entre lumière et obscurité. Elle m’a toujours émue par sa quête ; chercher à transformer ses blessures en désir artistique. Le monde entier a été touché par cette beauté tragique, ce paradoxe constant entre la star solaire et la mélancolie intérieure. Son mystère qui laisse toujours entrevoir la dimension humaine, profondément humaine. Sa vérité ne se résume pas à une légende.
Comment votre expérience d’actrice a-t-elle influencé votre écriture, et vice versa ?
L’actrice en moi prête sa voix aux mots et l’écriture, aidée par l’écrivain Olivier Steiner, a permis de creuser plus profondément dans les émotions. Quand on joue, on traverse des personnages autant qu’ils nous traversent. Quand on écrit, on traverse des états d’âme. Les deux se répondent. Il y a une forme de mise à nu dans l’écriture qui prolonge ce que je vis sur scène ou à l’écran. Et parfois, c’est à travers les mots qu’on accède à une vérité plus brute, plus nue que l’image.
Quelle est votre approche pour choisir des rôles qui vous sortent de votre zone de confort ?
Il y a toujours quelque chose qui échappe à un raisonnement, à une logique lorsque je m’engage pour un rôle. Je ne crois pas à l’existence d’une « zone de confort » qui serait une sorte de périmètre de sécurité ! Il y a probablement des « emplois » qui semblent plus évidents que d’autres, mais interpréter un personnage, pour moi, n’est jamais un exercice « confortable ».
Mais s’il devait y avoir un fil rouge dans mes choix, ce serait le besoin d’être chavirée intellectuellement ou émotionnellement. Et au-delà du rôle, c’est aussi la vision du réalisateur qui compte beaucoup, qui peut même tout changer. C’est donc autant un personnage et une histoire qu’une rencontre avec un réalisateur qui déclenche mon « oui » pour un rôle.
Dans la série Un couple parfait sur Netflix, comment avez-vous abordé le rôle de cette femme sans foi ni loi, très libre dans ses choix, et qui est à l’opposé de votre nature discrète ?
Il y a un vrai plaisir à jouer quelqu’un d’aussi déroutant, d’aussi affranchi des conventions. Elle est subversive, provocante, presque cruelle parfois. Mais le personnage d’Isabel Nallet n’est pas simplement celui d’une personne un peu manipulatrice, il y a une culture très europénne en elle et c’était aussi ça que la réalisatrice a voulu souligner.
Pouvez-vous nous parler d’un moment marquant de votre carrière qui a façonné votre approche du métier d’actrice ?
Le tournage de Possession a été un tournant. Ce rôle stigmatise’ par la déroute, une technique qui était chère à son metteur en scène. Andrzej Zulawski m’a poussée dans mes retranchements émotionnels et m’a appris à embrasser une forme de folie créative. Il m’a révélé que le jeu ne doit pas être une démonstration, mais une offrande. Depuis, je n’ai eu de cesse d’aborder mon métier d’actrice en me disant, soit je plonge, soit je passe mon chemin
Pouvez-vous nous parler de votre personnage dans la série Soleil Noir dont la sortie est prévue pour le tout début de l’été ?
Dans Soleil noir, j’interprète une femme prise dans une tourmente morale et politique, en pleine guerre de Succession. Son profil tout comme ceux des autres personnages de cette famille est féroce. Le narratif souligne leur complexité, leur part de dualité, et ce qu’ils disent de notre époque.
Vous êtes une femme de passion ou de raison ? (Sourire)
De passion du moins jusqu’à présent !
En tant que femme influente dans l’industrie du cinéma, quel message souhaiteriez-vous transmettre aux jeunes artistes qui aspirent à suivre vos traces ?
C’est une question… comment dire… presque vertigineuse, vous voyez ? Parce qu’on parle là non seulement d’un métier, mais d’une vocation, Je dirais avec toute l’humilité et la fragilité que ça implique qu’il ne faut jamais laisser quiconque éteindre cette lumière en nous. Et puis, je crois que ce métier appelle une forme de résistance à la compromission et aux tentatives extérieures de nous réduire à être moins que ce qu’on est.
Que pourriez-vous souhaiter aux lecteurs du LiFE Magazine ?
LIFE… déjà, ce mot résonne comme une respiration. Aux lecteurs du LIFE Magazine, je souhaiterais… une vie qui fait face à la vitesse, à l’uniformité, à l’injonction du bonheur formaté. On tient mieux le cap si on préfère les audaces aux certitudes, même si on traverse des turbulences en mode aérien et souterrain. Et même quand la vie nous fatigue, comme c’est le cas dans notre société, vu l’état du monde, se souvenir qu’on est jamais vraiment « au bout de sa life ».